CRISTINA ARES CASTRO-CONDE
Université de Santiago de Compostela
L’objectif de ce travail est d’analyser dans quelle mesure la reconnaissance
droit constitutionnel à l’expérimentation est un saut qualitatif
dans le processus de décentralisation de la V République. À cette fin, nous commençons par résumer les grandes étapes du développement régional dans la
ainsi que la configuration institutionnelle actuelle des régions galas; et nous utilisons l’expérience alsacienne de gestion des fonds européens
au cours de la période 2003-2006 (parce que, malgré son intérêt particulier, il n’a guère mérité l’attention de l’académie) comme un exemple de la portée de la
l’exercice du droit à l’expérimentation par un Conseil régional.
2. RÉGIONALISATION À LA FRANÇAISE
La régionalisation en France commence au milieu des années cinquante
avec la délimitation de 21 " régions de programme "),
en agrégeant le territoire de plusieurs départements (de 2 à 8, selon le cas). L’analyse de ses fonctions (planification, coordination, dévolution) confirme son caractère “fonctionnel” (et non démocratique). «Le
les groupes d’action régionaux constituent un cadre simple pour la gestion des
les intérêts de l’Etat " (Quermonne, 1963: 858).
Il faut attendre trois décennies d’un texte juridique, la loi du 2 de
Mars 1982, conférer aux régions la catégorie des collectivités territoriales, avec les départements et les municipalités (art. 59), reconnaissance qui deviendra effective quatre ans plus tard avec la célébration de la
premières élections des conseillers régionaux au suffrage universel, raison
pour laquelle l’année 1986 est considérée en France comme la naissance de
les régions et, de la part des plus optimistes, tournant "d’un
système d’administration à dominante centrale à un autre d’une pluralité
des niveaux de gouvernement concurrents " (Smith, 1997: 118) (4).
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(4) Keating et Hainsworth soutiennent de manière réaliste que les outils de contrôle
l’État central, ainsi que les pratiques centralistes qui restent la norme
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Tableau 1. Les grandes dates de la régionalisation à la française
30 juin 1955 délimitation de 21 “régions de programme”, en agrégeant le territoire de plusieurs départements.
4 octobre 1958 la Constitution de la Cinquième République ne reconnaît que deux types de collectivités: les départements et les municipalités.
1960 les “régions de programme” sont remplacées par des “districts d’action régionale” (5).
1963 création de la délégation à l’Aménagement et à l’action du Territoire (DATAR).
1964
Le préfet du département auquel appartient la capitale de la région reçoit le titre de “préfet de la région” et les Commissions de développement économique régional (CODER) sont instituées (6).
27 Avril 1969
Le projet de loi relatif à la création des Régions et au renouvellement du Sénat, promu par le général de Gaulle, est rejeté
lors du référendum.
en France il relativise le transfert effectif de compétences aux collectivités locales
(KEATING et HAINSWORTH, 1986: 31).
(5) Voir les travaux de Pasquier (2003a) sur les déterminants du processus
régionalisation, qui fournit un examen solidement basé sur des données empiriques originales de l’interprétation exclusivement descendante de la même, mettant en lumière la
contributions des acteurs régionaux et du Mouvement fédéraliste.
(6) le préfet de région est le préfet du département dans lequel le capital de
région. Outre les prérogatives qui lui correspondent en tant que Préfet de département, il remplit un rôle économique, politique et administratif de Premier Ordre en tant que responsable des grands projets du gouvernement central dans la région, ainsi que de la direction de
les services déconcentrés de l’administration centrale. Le préfet de région préside,
en outre, le Comité d’Administration régionale (CAR), où le
Préfets de département et chefs de service des services décentralisés de
Le gouvernement central, et joue un rôle important dans l’élaboration des politiques de développement
planification économique et territoriale, ainsi que dans la négociation et la mise en œuvre
etat-région, contrats de plan. Enfin, le préfet de région exerce des activités juridiques et
les comptes des actes de la région, tout en détenant des pouvoirs d’impulsion et de coordination de l’action des préfets de Département. Le décret du 29 avril 2004 a renforcé leurs pouvoirs, ce qui représente une différence importante par rapport aux processus de décentralisation menés dans d’autres États européens, dans lesquels le renforcement des autorités régionales s’est accompagné d’un affaiblissement des représentants de
gouvernement central dans les régions et une contraction de l’administration périphérique de l’État Central en eux.
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1972 création d’une nouvelle Région métropolitaine, la Corse, qui se disloque
de Provence-Alpes - Côte d’Azur.
5 Juillet 1972
Les circonscriptions d’action régionale sont renommées “régions” et une entité publique portant le même nom est créée dans chacune d’elles. Dans chacun, un Conseil régional est établi composé de députés, de sénateurs élus dans la région et de représentants de leurs départements et municipalités. Cependant, la puissance
exécutif et des services sous l’autorité du préfet.
2 Mars 1982
La loi sur les droits et libertés des communes,
départements et régions, du 2 mars 1982,
une véritable régionalisation en conférant aux régions au rang de collectivité territoriale, les conseils régionaux
élu au suffrage universel direct et avec un président responsable de l’Exécutif régional.
29 Juillet 1982
La Loi sur la réforme de la planification établit les contrats de plan
Etat-région pour la réalisation d’objectifs compatibles avec ceux de la
Plan de la nation.
1983
L’Adoption de deux lois sur le transfert des compétences
autorités territoriales qui excluent expressément toute tutelle de
une collectivité territoriale sur une autre, ce qui implique que les régions
ils ne peuvent exercer aucun type de contrôle sur les ministères et
municipalité. Ils régissent la répartition des compétences comme suit:
a) la chose la plus proche du Citoyen (urbanisme, musées, écoles, etc.),
B) prestations sociales et équipement
développement rural, pour les départements; et développement économique, formation professionnelle et aménagement du territoire, pour les régions.
26 Janvier 1984 loi fondatrice de la fonction publique territoriale, qui s’ajoute à la Fonction Publique Centrale de l’État et à la fonction publique hospitalière.
1984-1988 première génération de contrats de plan État-Région, dans le cadre du plan IX.
6 Janvier 1986
La loi sur l’organisation des régions conçoit le fonctionnement des conseils régionaux sur le modèle de l’
Conseils généraux (7).
(7) les Conseils généraux sont les Assemblées délibérantes des départements, bien que le terme soit également couramment utilisé dans un sens général pour
désigner la collectivité territoriale dans son ensemble. Le mandat des directeurs généraux est, comme celui des directeurs régionaux, de six ans, bien que, dans le cas
ministériel, la composition de l’assemblée est renouvelée par moitié tous les trois ans.
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16 Mars 1986
Première élection des conseillers régionaux au suffrage universel,
en utilisant un système proportionnel à un tour et des listes départementales.
17 Octobre 2000
Le rapport Mauroy sur l’avenir de la décentralisation propose
faire de la région un pivot de l’organisation territoriale et
d’une plus grande clarté des ressources des ministères et des municipalités.
27 Février 2002
La loi sur la démocratie de proximité prévoit des transferts de
compétences, notamment à titre expérimental. Il est considéré comme
une relance consensuelle, quoique faible, de la décentralisation.
28 Février 2003
Programme discours du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin
a Rouen annonçant une série de réformes de l’organisation territoriale de l’Etat, connue sous le nom d ’ “Acte II de la décentralisation”.
28 Mars 2003
La loi constitutionnelle sur l’organisation décentralisée de
la République a réformé la constitution de 1958 en ajoutant à son premier article l’expression “l’organisation (de la France) est décentralisée”, et en énumérant les régions parmi les collectivités territoriales, dans son nouvel article 72.
1er août 2003 lois organiques sur le référendum local et l’expérimentation.
automne 2003, la réforme des finances des collectivités locales et, en particulier, des régions.
Mars 2004 élection des conseillers régionaux selon un nouveau système
proportionnelle avec liste régionale unique.
21 Juillet 2004
La loi organique relative à l’autonomie financière oblige les ressources propres des collectivités territoriales à représenter un
déterminer une partie de toutes ses ressources.
Le 13 août 2004
Tableau 2. Caractéristiques fondamentales de la décentralisation à la française
l’exécution de ses délibérations. En outre, le président se charge de la représentation de la région, la gestion de son patrimoine et la direction de son
Administration, pouvant, si nécessaire, recourir aux services décentralisés de l’administration centrale. Cependant, la projection politique du président régional est beaucoup plus grande que celle de son homologue départemental, comme en témoigne la pertinence politique de l’élection de candidats pour l’occuper (Stevens, 2003: 154).Et c’est que, quel que soit leur
fonctions juridiques, la présidence d’un Conseil régional induit une responsabilité politique de premier ordre. Il confère à son propriétaire une notoriété, des moyens d’expression et d’action souvent comparables à ceux offerts par un
fonction gouvernementale "(Bœuf et Magnam, 2006: 70).
En passant à l’analyse de sa compétence, nous constatons que le
région, destinée à être une administration de mission ou de prospection, et non
gestion, a peu de compétences de nature exclusive, pas plus que le
le transport ferroviaire régional et la construction et l’entretien des écoles secondaires, y compris la gestion de leur personnel non enseignant
(après que la loi du 13 août 2004 a transféré de nouvelles compétences à l’administration régionale). Cependant, il a des responsabilités importantes dans d’autres domaines, tels que le développement économique, la gestion de
la protection de l’environnement et de la formation professionnelle. En outre, la loi du 27 février 2002 sur la démocratie locale
sur une base pilote, de nouveaux transferts de
pouvoirs, dans le domaine du développement des ports et des aérodromes, de
gestion des aéroports, Protection du Patrimoine, qualité de l’air et
réserves naturelles régionales, et même la gestion des fonds Européens.
Le développement économique est le principal domaine d’action des régions
ceci est confirmé par la loi du 13 août 2004, qui attribue
de nouvelles compétences dans ce domaine, telles que les aides économiques aux entreprises et, à titre expérimental, pour une période de cinq ans, le développement de
programme de développement économique régional; tout en les responsabilisant
“coordonner” toutes les actions de développement économique entreprises
pour l’ensemble des collectivités Territoriales de son territoire.
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En ce qui concerne ses ressources financières, il a été dénoncé dans la
Débat politique français la dépendance financière excessive des régions
concernant l’État central. La révision constitutionnelle du 28 Mars
2003 essayé de pallier cette difficulté avec l’introduction d’un nouvel article 72.2, qui reconnaît l’autonomie financière des collectivités locales dans les termes suivants:
Les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions prévues par la loi. Peut recevoir
tout ou partie du produit d’impositions de toutes sortes. La loi peut
les autoriser à fixer la base et le taux dans les limites fixées par la commission.
Les recettes fiscales et autres ressources propres des collectivités locales représentent, pour chaque catégorie de communauté, une part déterminante de l’ensemble de leurs ressources. La loi organique fixe les conditions de la
qui cette règle s’applique. Tout transfert de compétences entre l’etat et les collectivités territoriales est accompagné par l’attribution de ressources équivalentes à celles qui sont consacrées à leur exercice. La création ou l’
extension des compétences entraînant une augmentation des dépenses
des autorités locales est accompagné par les ressources déterminées
par la loi. La loi prévoit des arrangements de distribution visant à promouvoir la
égalité entre les autorités locales et régionales.
La Loi organique du 29 juillet 2004 relative à l’autonomie des collectivités territoriales, adoptée en application de l’article précédent, définit
ressources juridiquement propres et fixées pour chaque catégorie de
un seuil en dessous duquel la proportion ne peut pas tomber
leurs ressources totales, exigeant également qu’elles soient toujours supérieures au niveau de l’année 2003.
Dans tous les cas, le budget annuel des conseils régionaux, qui
il varie entre 600 et 800 millions d’euros, bien en deçà des chiffres habituels dans les régions politiques de l’Union. En effet, les dépenses des régions françaises ne représentent que 12 pour 100 de la consommation totale de
les autorités locales (en Espagne, elles se situent en moyenne autour de 70 pour 100).
3.1. Les régions françaises et l’UNION européenne
Conformément à sa faiblesse institutionnelle, de compétence et financière,
les régions françaises disposent de peu de canaux formels de participation
Affaires européennes (12). N’ont attribué aucun rôle dans la formation de la
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(12) il convient de noter que la question de la participation des régions dans
l’Union européenne du débat politique sur la décentralisation en France. Je ne sais même pas
la position de l’exécutif français exprimée en Conseil des Ministres, qui
il est élaboré dans le cadre de négociations interministérielles entre la délégation interministérielle à l’Aménagement du Territoire et à la compétitivité des territoires
(DIACT, délégation interministérielle à la planification territoriale et
compétitivité des territoires, depuis sa création en 1963 et jusqu’au 1er janvier
De 2006, denominada Delegación de ordenación del territorio y acción regional, DATAR, Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale)
et les ministères compétents selon le sujet, sous la coordination
du Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE, depuis sa constitution en
1948 et jusqu’au 18 octobre 2005, appelé Secrétariat général du comité
interministériel, SGCI) (13).
La possibilité contenue dans le Traité instituant la communauté
Les régions à la délégation des États au Conseil
(art. 203 du traité ce) n’a pas été développé en France, où aucun des deux n’existe
prévisions concernant la participation du personnel de l’administration régionale aux Comités de mise en œuvre de la Commission (comitologie). Même toutes les régions gauloises ne sont pas représentées individuellement
dans le comité des régions.
Cependant, la rareté des canaux formels de participation à la disposition des régions françaises sur la scène européenne a été partiellement remédiée, en interne, grâce à deux particularités institutionnelles du système politique français, telles que: 1) l’importance conservée par l’administration périphérique de l’État central, le système préfectoral, dont elle dépend en partie.
en tant que source d’information sur le terrain, le gouvernement
Paris; et 2) le cumul des mandats (Balme, 1994:
260; Benz et Eberlein, 1999: 338-9; Hooghe et Marks, 1996; Keating et Hooghe, 2006: 275; Mazey, 1994: 214 et 1995: 145; Smith, 1997: 122-3; Smyrl,
1998: 114-5). Bien que le cumul des mandats ait déjà été limité. 46
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il a inclus la question du rôle des collectivités territoriales au niveau supra-étatique dans la
agenda de réformes de “l’Acte II de la décentralisation”, simultanées, même, avec le débat sur l’avenir de l’Europe.
(13) afin d’assurer la cohérence et l’unité de la position française devant l’Union
Le service du Premier Ministre, le SGAE, est chargé de la coordination interministérielle des affaires européennes (à l’exception de celles relatives à la PESC, qui relèvent de la compétence de la Commission.
le Ministère des Affaires étrangères) et ceux de l’OCDE. Le SGAE cherche à concilier les positions des différents ministères français et, en cas de désaccord sur une question
politiquement sensible, il demande l’arbitrage du Premier ministre, qui donne des instructions directes au Représentant de la France à Bruxelles. Les informations qui parviennent à cet État des institutions de l’Union sont également centralisées dans le SGAE, qui est alors chargé de les diffuser
parmi les administrations concernées.
pour les partisans de cette ligne d’argument, le système aurait
créé pendant sa longue période de pleine validité habitudes comportementales
et continuer à donner une plus grande force politique aux intérêts territoriaux (Stevens, 2004: 162). Cependant, il a également été déclaré, au contraire, que l’exercice simultané de mandats est toujours
conflit avec les initiatives des élus régionaux au niveau supra-étatique (14).
4. LE DROIT À L’EXPÉRIMENTATION
Comme nous l’avons déjà dit, l’article 72 de la Constitution française du
1958, à la suite de la réforme effectuée par la loi constitutionnelle sur l’organisation décentralisée de la République du 28 mars 2003, établit que:
dans les conditions prévues par la Loi organique, et sauf lorsqu’elle affecte
conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou à droite
constitutionnellement garanti, les collectivités Territoriales ou leurs groupements Peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l’a prévu pour elle,
abrogation, à titre expérimental et pour un but et une durée limités,
dispositions législatives ou réglementaires régissant l’exercice de ses pouvoirs.
La Loi organique du 1er août 2003, qui précise les conditions de
La constitutionnalisation du droit à l’expérimentation à l’article 72 du texte fondamental de 1958, révisé en mars 2003, bien que marginal sur le plan législatif et limité sur le plan juridique, témoigne de la volonté de l’élite politique française d’entamer une nouvelle étape dans la
processus de décentralisation de la Ve République, bien que sans rompre avec l’esprit des lois Deferre, qui ont établi une décentralisation de la gestion.
Dans ce travail, nous avons présenté l’expérience méconnue de la gestion du programme Objectif 2 Alsace par le Conseil Régional, lors
la période 2003-2006, à titre d’illustration de l’exercice de ce droit. Cas
La preuve alsacienne que le droit à l’expérimentation permet le progrès
plus rapidement aux autorités locales avec une plus grande volonté et capacité à assumer de nouvelles compétences.
En bref, la reconnaissance constitutionnelle du droit à l’expérimentation aux communes, départements et régions, en leur accordant un rôle de
laboratoire, établit un modèle territorial différent, qui cherche un
une plus grande initiative locale. L’expérimentation permet, en pratique, paraphrasant le Premier ministre Raffarin, d’introduire la notion de diversité
dans une république fondée sur l’uniformité, permettant, par conséquent,
plus entrepreneuriales Les régions françaises sont à l’avant garde de l’ensemble
le niveau régional de décentralisation en France.
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Revista de Estudios Políticos (nouvelle ère)
ISSN: 0048-7694, Núm. 143, Madrid, janvier-mars (2009), p. 31-55 55
LA RÉGIONALISATION À LA FRANÇAISE: LE CHAMP D’APPLICATION DU DROIT … CRISTINA ARES CASTRO-CONDE